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2ème Dimanche du TO B

P Michel Mounier

Jn 1. 35-42

Les lectures du livre de Samuel et de l’Évangile de Jean sont des récits d’appel. Ils présentent des ressemblances qui, au-delà des schémas bibliques, révèlent sans doute des constantes de la « conduite de Dieu » envers les hommes, et donc envers chacune, chacun de nous. Prudence cependant. Dieu, qui est la vie, n’est pas lié par des procédures stéréotypées. Pensons à Claudel, à la rencontre de Moïse sur l’Horeb, ou à l’appel de Lévi dans l’Évangile de Matthieu. En ce domaine aussi, il y a les coups de foudre. Disons que les choses se passent souvent comme cela. Je reviendrai sur Lévi.
Samuel n’aurait pas su identifier l’appel de Dieu si le prêtre Eli, par le prophète, n’avait pas été là pour le lui révéler. De même les premiers disciples du Christ ont eu besoin que Jean le leur désigne comme « l’Agneau de Dieu qui porte le péché du monde ». Cela nous parle de l’importance, voire de la nécessité des médiations : Dieu nous vient les uns par les autres. Et finalement même l’appel de Lévi chez Matthieu passe par une médiation, celle de Jésus de Nazareth. La rencontre entre Dieu et celui qu’il appelle une fois réalisée, le médiateur s’efface : cela se révèle pour Eli dans le livre de Samuel, pour Jean-Baptiste dans l’Évangile. Mais ce n’est pas vrai pour Lévi chez Mathieu. Car là le médiateur ne peut s’effacer : ce n’est pas seulement par lui que s’effectue la rencontre, elle se produit en lui. Il est lui-même rencontre de Dieu et de l’homme. Mystère sublime et incompréhensible que le christianisme appelle incarnation. Dans l’Évangile de Jean, la médiation se poursuit en cascade : c’est par André que Pierre rencontre Jésus. N’est-ce-pas une invitation à regarder les autres d’un œil nouveau ? Ils peuvent être chemin de Dieu pour nous. Dans le même Évangile, les villageois disent à la Samaritaine : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons maintenant : nous l’avons entendu par nous-mêmes et nous savons que c’est vraiment lui, le sauveur du monde. »
Autre constante qui nous invite à la patience : souvent l’appel se produit en plusieurs fois. Pour Samuel, il y a trois appels. Et dans l’Évangile de Jean, les disciples n’ont suivi le Christ qu’à la seconde désignation par le Baptiste. Au début, les futurs disciples restent inertes, sans doute déconcertés d’entendre qualifié d’Agneau de Dieu un homme comme les autres. Patience donc. A l’égard des autres et envers nous-mêmes. Patience d’autant que la réponse n’est jamais acquise une fois pour toutes. Pour le moment, les disciples suivent Jésus, beaucoup le quitteront au fil des jours, au Golgotha il n’y aura pas foule. Et même lorsque les femmes le diront ressuscité, ils resteront enfermés, portes verrouillées, terrassés par le peur.
Chacune, chacun de nous a son histoire avec le Christ. Coups de foudres et doutes mêlés, inquiétude et confiance. Telle est la condition humaine que Dieu est venu habiter en Christ. Que nous soyons, les uns pour les autres, les témoins de la fidélité de Dieu. Que la foi des uns et des autres nous porte ensemble là où chacun en est de son histoire avec le Christ. C’est toujours une histoire sainte.