Close

Jeudi de la 4ème semaine du TP B

Fr Gilles Berceville op Paris

Lectures du jour : Ac 13, 13-25 et  Jn 13, 16-20

Le chapitre 13 des Actes marque un tournant. Désormais, c’est le personnage de Paul qui prend la première place dans le récit. On lit ainsi au verset 13 qui ouvre le passage que nous venons d’entendre : « Paul et ses compagnons », alors que quelques versets plus hauts, Luc met toujours Barnabé en tête de la liste des missionnaires (cf. 13, 2 et 7).
Il nous est donné d’entendre aujourd’hui le début du premier discours de Paul dans les Actes, adressé à ses frères Israélites et aux Non Juifs partageant leur foi, des « craignant Dieu » comme le centurion Corneille, dont il a été question un peu plus haut (chapitre 10).
De manière bien significative, lorsqu’il s’adresse à l’assemblée réunie ce jour-là dans la synagogue, Paul rappelle ce qui est arrivé à son ancêtre Saül. Car Paul, et c’est sans doute ainsi qu’il s’est présenté à ses correligionnaires d’Antioche de Pisidie, appartient à la tribu du roi Saül, la tribu de Benjamin. Comme beaucoup de ses contemporains juifs, et de personnages des Actes, il porte un double nom, un nom juif : « Shaoul », et un nom grec ou romain, « Paulus », qui est une traduction ou une forme plus facilement prononçable du nom juif.
Dans son nom juif de «  Shaoul », Paul discerne le sens de sa vocation. Sur le chemin de Damas, il s’est entendu appelé par ce nom. De façon émouvante, au chapitre 9 des Actes, dans la bouche de Jésus qui lui apparaît, le nom juif de l’Apôtre est retranscrit non pas sous la forme grecque ordinaire de « Saulos », comme partout ailleurs dans le texte, mais dans une translittération plus proche de l’original : « Saoul ». « Saoul, Saoul, pourquoi me persécutes-tu ? » (9, 4). Assurément, l’auteur des Actes garde à l’oreille le récit tel qu’il fut prononcé, et avec quelle émotion, par Paul lui-même.
Et bien, le roi Saül, son ancêtre, Paul se réclame de lui pour rappeler qu’il fut « déposé » par Dieu, comme sur le chemin de Damas, lui-même, Shaoul/Paul, fut « jeté à terre » par Jésus. Le roi Saül fut déposé pour donner place à David qu’il persécutait. De même, l’apôtre Paul fut jeté à terre pour donner place à Jésus, fils de David, qu’il persécutait en ses membres. Ainsi Saül le Juif devient Paul le chrétien pour que Jésus le Nazaréen devînt le Christ de tous. Accepter ce changement n’était pas pour Paul renoncer à son appartenance à Israël (cf. Rm 9, 2), c’était au contraire l’accomplir, de même que la race de Benjamin accomplit sa mission dans l’amitié et l’effacement de Jonathan, fils de Saül, devant David, l’élu de Dieu, son ami. Le message de Paul est donc ici clairement que maintenant, pour accomplir sa mission, Israël doit s’effacer devant Jésus, le Juste que Dieu a ressuscité, afin de le laisser apparaître comme le Christ de tous, Juifs et craignant-Dieu.
Nous devons nous aussi, chacune et chacun à notre manière, savoir nous effacer, le moment venu, pour que Jésus soit le Christ de nos frères. Demandons que ce soit à la manière de Jo-Nathan ou encore de Jo-Han, le Baptiste (les deux noms ont même signification : Dieu donne, Dieu fait grâce), immédiatement après évoqué par Paul (v. 24 et 25). C’est-à-dire non sous la contrainte des événements, mais dans un geste d’amour.