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Solennité de la Pentecôte C

Fr Pascale Marin op

Jubilé d’or de sr Geneviève

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Nous fêtons en cette année 2019 la Pentecôte dans le triste contexte d’une Eglise, qui peut nous sembler avoir été désertée par l’Esprit.

En des heures, où je reprends le mot à sœur Geneviève : “Nous avons mal à l’Eglise”. Oui, nous avons mal à l’Eglise, lorsqu’en la personne de gens d’Eglise, les pires errements de la chair se trouvent confondus avec les motions de l’Esprit saint et qu’alors la parole de saint Paul dans son adresse aux chrétiens de Rome, celle que nous avons entendue dans la lecture, se voit niée, contredite.

“Vous, leur disait-il, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous celle de l’Esprit”. Alors peut-on encore célébrer l’Esprit saint dans le sentiment découragé d’une telle faillite ?

Mais oui, bien sûr et a fortiori, et encore plus ! D’abord parce que l’Eglise, c’est beaucoup plus vaste que ceux qui ont autorité en elle. Et tous ceux-là et même la plupart, j’ose le dire, (Dieu merci !) n’ont pas perdu la boussole du saint Esprit. L’Eglise, c’est l’assemblée immense de tous les fidèles du Seigneur Jésus.

Et puis l’Esprit saint, Il n’est pas réservé à l’Eglise, aux Eglises, à tous ceux et celles qui en elles assument avec plus ou moins de foi, et d’espérance, le beau nom de “chrétiens”. L’Esprit saint n’est pas réservé aux chrétiens.

Dieu n’est pas le créateur des chrétiens, Il est le créateur de l’humain. Et partout, là où il y a l’humain dans ce qui en nous est généreux, est beau, est courageux, est grand spirituellement, là œuvre l’Esprit saint.

C’est ce que symbolise la scène de la Pentecôte dans les actes des Apôtres. Avec sa litanie des nations, des religions et des cultures. Parthes, Mèdes et Élamites, Romains, Crétois et Arabes. Parmi ces noms, la plupart nous sont devenus étrangers, ils n’ont plus de sens pour nous. Il faudrait actualiser cette liste avec une autre litanie, celle des identités plurielles qui composent ce pays, ce monde, si divers en cultures, religions, convictions, en manières de pensée et de vivre. Mais ce n’est pas la peine, parce que son lieu à l’Esprit saint, là où il vient, là où il travaille la pâte qu’il fait lever comme un levain. Ce n’est pas un groupe, une identité. C’est toujours une personne, un visage. Une personne bien sûr connectée et plus encore alliée avec d’autres. Une personne qui ne pense pas “je”, mais qui pense “nous”. Et se penser comme ça, se penser “nous”, c’est déjà un signe du saint Esprit.

Mais l’Esprit son œuvre, c’est de façonner des visages. Des traits qui laissent percevoir un peu de Sa force, Sa douceur, Sa joie. Et cela en dépit de toutes les imperfections, de la lourde pâte humaine que l’Esprit vient travailler patiemment. Et je reprends à nouveau le mot à sœur Geneviève : “L’Esprit, dit-elle, il écrit clair avec nos griffonnages”. Oui, nos griffonnages ! L’Esprit ne produit pas des personnes lisses, parfaites. Cette œuvre de l’Esprit, qu’on disait autrefois de divinisation, elle prend la voie plutôt d’une humanisation. Mais de celle qui fait devenir radicalement humain, là où l’humain rejoint le divin, là où le Ciel affleure à même nos terres humaines. Et je cite encore sœur Geneviève : “la flamme de l’Esprit, c’est de tous les âges, nous dit-elle, elle brûle les scories et donne du zou pour porter la Parole, même quand on est une vieille moniale”. Et pourquoi même ? Il faut dire surtout. Dieu ne fait pas de jeunisme, Lui ! Et pour cause. Car à tous les âges, la seule jeunesse qui vaille, c’est l’éternelle jeunesse de l’Esprit. Ça donne en effet du zou, l’Esprit saint, du goût de vivre. Ça anime la parole, pas le blabla, la vraie. Celle qui soigne ce qui est blessé, celle qui assouplit ce qui est raide, celle qui rend droit ce qui est faussé, celle qui met la joie au cœur. Et c’est dans la joie et avec un grand merci pour tous ceux et celles qui ont été pour nous, les témoins de cette parole de la vie, et tout particulièrement en ce jour de son jubilé, pour notre sœur Geneviève, que nous accueillons ce matin, la présence du Seigneur dans le sacrement où il nous rassemble. Amen.