Close

19ème Dimanche du TO B

Fr Bernard Senelle op Paris

Jn 6. 41-51

Ecouter :

Lire :

La Bonne Nouvelle de ce dimanche part d’une récrimination au sujet de l’identité de Jésus. Qui est-il pour parler ainsi ? Nous connaissons son père et sa mère et il prétend être descendu du ciel. Avouons qu’il y avait de quoi se poser des questions pour les contemporains de Jésus et que le bon sens s’en trouvait quelque peu heurté. Les murmures vont bon train et il fallait y croire pour entrer dans l’acceptation. La question de Jésus est d’ailleurs toujours d’actualité dans le dialogue judéo-chrétien et constitue la ligne de partage entre le judaïsme et le christianisme mais elle est pacifiée.
Nous croyons qu’il vient du Père, que Lui seul l’a vu, nous croyons nous chrétiens qu’il est celui qui se donne aux hommes et qu’il transmet la vie. Jésus est celui qui voit Dieu et qui nous donne la vie. Il est le Christ, choisi par Dieu son Père et nous venons le prier, participer à l’eucharistie qui rend grâce pour ce don et célébrer sa mort et sa résurrection. Le sang du Christ a été répandu sur la croix pour le salut de tous, sa chair meurtrie a été donnée pour que le monde vive d’une passion d’amour. “Dans sa chair, il a tué la haine,” pour que nous ayons la vie. Jésus, dont le nom signifie « Dieu sauve » se donne pour vaincre le mystère du mal dans le monde.
Et cela commence dans les murmures et la récrimination à l’inverse de ce que Paul nous invite à vivre en étant entre nous pleins de générosité et de tendresse. C’est le pain pour la route en famille, en communauté, au travail, dans les joies et les contradictions. Sur ce chemin de confiance, nous sommes comme le prophète Elie et Dieu nous dit : «  Debout, mange, car il est long le chemin qui te reste. » Nous avons le Christ et cette parole du Dieu qu’il voit résonnera en nous quand tout à l’heure, nous nous approcherons pour communier.
Dieu veille sur nous comme sur Elie mais, comme le prophète, comme le Christ, nous sommes là pour donner la vie et transfigurer le monde par notre don, en servant l’humanité selon nos aptitudes et nos dons respectifs. Jésus a pacifié l’humanité par sa Passion, il a transfiguré les réalités de ce monde par son amour des personnes et sa relation au Père. Et nous alors ? Edith Stein qui a pris le nom de sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix avant de mourir à Auschwitz et d’être canonisée par Jean-Paul II écrivait : «  Dans la nuit obscure surgissent les plus grandes figures de prophètes et de saints. Mais le courant de la vie mystique qui façonne les âmes reste en grande partie invisible (…) Ce n’est qu’au jour où tout ce qui est caché sera manifesté que nous découvrirons aussi à quelles âmes nous sommes redevables des tournants décisifs de notre vie personnelle. »
Jésus se donne, les saints se donnent, des hommes et des femmes dont nous ignorons peut-être l’identité nourrissent notre existence et révèlent le visage du Dieu vivant. Frères et sœurs, c’est le dimanche du Dieu qui se donne au fil de notre marche avec les méandres et les passages au désert, les jours où nous ne comprenons pas très bien ce qui nous arrive. « Lève-toi et mange, car il est long le chemin qui te reste ». Dieu ne lui dit pas qu’il est bientôt arrivé mais que le chemin est encore long et sinueux voire escarpé.
Et bien c’est là que le prophète Elie tout comme Moïse en son temps est attendu par Dieu. Il est vide, le quotidien est pour le moins monotone et Dieu est là parce qu’il est démuni, face à lui-même, sans protection ni moyen de fuir. C’est là que tombe la promesse de la vie éternelle, le pain pour la route qui non seulement est longue mais ne finit pas. C’est la vie sans fin où nous serons parfaitement présents au Dieu qui se donne.
Nous avons peut-être un peu perdu de vue cette exigence d’être présent à ce que l’autre nous dit, à ce qu’il nous donne, à sa vie. Le Christ vient mendier cette présence et cette attention et il se fait présence. « Dieu seul suffit » disait Thérèse d’Avila, cette autre grand figure du Carmel. Découvrons cette présence désintéressée et pleine d’amour devant Dieu et pour Dieu. C’est la vie éternelle.