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Dimanche de Pâques 2017 - A

Frère Bernard Senelle op

16 Avril 2017

Jn 20.1-9

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Lentement, en ce matin de Pâques, depuis la Genèse, l’Exode et l’appel d’Abraham en passant par les prophètes, Dieu s’approche de nous en son Fils le Vivant. « Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! » Depuis cette nuit, à l’écoute des textes bibliques pleins d’humanité, unis à nos frères juifs qui célèbrent la Pâque et en communion spéciale avec tous les chrétiens d’Orient et d’Occident nous célébrons notre Sauveur.
Il s’est avancé dans notre monde sous les traits d’un enfant se révélant à quelques bergers, aujourd’hui, Jour de la Résurrection, Il frappe humblement à la porte de nos cœurs et de notre monde. Si la Passion, la mise à mort et la violence déchaîne les foules, la Résurrection ne s’adresse d’abord qu’à un petit groupe de disciples auquel nous devons faire confiance. C’est ainsi que dans la Bible Dieu se révèle. Il s’est adressé d’abord à Abraham et non aux puissants de ce monde, Il a choisi de parler en premier aux juifs et non à tous les peuples de la terre. Le Vivant vient, sollicite Marie-Madeleine et c’est elle qui fait la première annonce. Une fois encore, le Seigneur de l’Univers se manifeste dans la discrétion et non dans l’éclat et le tonnerre. On peut y croire comme on peut l’ignorer.
Si nous lui donnons accès à nos ténèbres, il nous relèvera, nous rendra capable de voir et de croire comme le disciple bien-aimé. Le style de Dieu c’est de ne pas écraser mais d’ouvrir, de donner la liberté, de susciter et, sans fin de re-susciter l’amour. Ce matin Dieu relève son Fils et renouvelle toute chose à commencer par notre capacité d’aimer. Béni soit-il. On peut lui dire comme François d’Assise : « Loué sois tu, Laudato Si’ pour le jardin de la résurrection qui permet la joie au lieu de la violence du jardin d’agonie. » Toute la Création ressuscite par la flamme de notre foi, de notre espérance et de notre amour pour Dieu, pour les autres, pour l’ensemble du cosmos. Depuis cette nuit, ce cierge pascal joint sa clarté à celle des étoiles car c’est la nuit que scintillent les étoiles et pour ceux qui sont dans les ténèbres.
Également, la joie du Ressuscité brille comme un phare sur une mer qui, pour beaucoup, demeure agitée. Je ne suis pas perdu, la joie est là présente ou à l’horizon comme un repère pour me donner la force d’avancer au large. L’inimaginable se produit, l’imprévu surgit dans notre monde programmé ! Aujourd’hui, nous sommes ressuscités parce qu’il y a du neuf, de l’inédit en moi, dans ma famille, dans ma communauté, dans le monde : en ce jour s’unissent l’homme et Dieu, le fini et l’infini.
Dieu, si nous y croyons, nous bouleverse, nous chamboule ! Son Fils a échappé à la corruption, il est là, ce n’est pas un esprit mais un homme véritable qui vient de Dieu et qui lui-même est Dieu. L’homme de Galilée vit d’une manière nouvelle soustrait pour toujours à la loi de la mort. Ce matin, nous osons y croire pour tous les jours où c’est peut-être plus difficile. L’ombre s’efface devant la lumière, la mort est vaincue par la vie.
Si le Christ n’est pas ressuscité, vide alors est notre message, vide aussi notre foi »1. Il n’est pas deux manières identiques de vivre la Résurrection et si nous sommes montés à Chalais ce matin, c’est parce que l’événement que nous célébrons nous atteint. Ce n’est pas un fait divers, une information qui débarque dans le cirque médiatique mais un marqueur de notre existence comme le sont les grandes étapes de notre vie. Pensons aux baptisés de cette nuit pascale, à ceux qui s’aiment et s’apprêtent à se donner le sacrement de mariage, à ceux qui donnent leur vie à la suite du Vivant, pensons à celles et ceux qui sont au seuil du grand passage. En quoi la résurrection du Christ est-elle aussi ma résurrection, mon relèvement ? Jésus n’est pas revenu à une vie humaine normale de ce monde, comme Lazare et d’autres morts ressuscités par Jésus. Il sort vers une vie différente, vers l’immensité de Dieu et nous entraîne vers l’infini.
Parfois, je pense connaître mais j’ignore les trésors cachés, les perles enfouies bien profondément et sous bien des décombres. Pâques, c’est la joie d’un nouveau regard, c’est la découverte au jardin de résurrection de l’amour renouvelé, d’une fraîcheur retrouvée au terme d’un temps de désert, Pâques c’est la guérison et le temps du salut. Ce matin, il m’est donné de reconnaître ce que je ne voulais pas voir chez l’autre, ce matin je rends grâce parce que Dieu compte sur une personne que je n’aime pas, à qui je ne parle plus, que j’ai peut-être choisie d’ignorer.
En ce jour, la beauté de la Création fait surface et c’est le passage de l’indifférence ou du mépris au respect et à l’émerveillement. Dieu compte sur nous pour dire que la vie est bonne et que le monde qu’il a créé est beau. Allons comme Marie-Madeleine et les deux disciples proclamer notre joie : Le Christ est ressuscité !