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4ème dimanche du TO - C

Frère Thomas-Marie Gillet op

31 janvier 2016

Luc 4, 21-30 La liberté du Christ

En arrivant, j’ai souhaité être éclairé sur la période concernant le rachat de Chalais par Notre Père Henri-Dominique Lacordaire et l’installation du noviciat des Frères Prêcheurs en ces lieux… Et voici qu’en préparant cette homélie, en méditant sur cette page de l’évangile selon saint Luc, je me suis remémoré le titre d’une biographie de Lacordaire par Marc Escholier parue en son temps au « Livre de Poche » : Lacordaire ou Dieu et la liberté. Et il est vrai que s’il y a une chose qui peut caractériser le parcours du R.P. Lacordaire, c’est qu’il fut un homme de Dieu épris et mû par la liberté. Cette liberté appartenait certes pour lui au domaine politique et social de son temps (il défendit la liberté d’enseignement ; il prit partie pour la séparation de l’Église et de l’État, entre autres combats) mais c’était au fond bien plus : la disposition de tout son être, une liberté de l’esprit et du cœur. Grâce à cette liberté il a eu le courage et l’audace de réimplanter en France, cinquante ans après les interdits révolutionnaires, un ordre religieux, et qui plus est, celui qui portait l’opprobre de l’Inquisition.
C’est cette même liberté qui avait poussé saint Dominique, sept cents ans plus tôt au moment où il n’avait auprès de lui qu’une poignée de frères, à les disperser dans toute l’Europe. À ceux qui craignaient que cela ne détruisît la fondation nouvelle Dominique répondait : « Laissez-moi faire, je sais ce que je fais ! ».
On sent bien que la liberté dont il est question ici n’a rien à voir avec la licence ultra-permissive, avec le libertinage, avec un droit quelconque. C’est que cette liberté-là vient de plus haut que nous-mêmes ; elle vient de Dieu et le Christ en a pour nous rendu témoignage. Le Christ est libre. Il est libre de dire ce qu’Il a à dire que cela plaise ou non. Il est libre de faire ou non des miracles. Il est libre de ne pas agir en fonction d’un groupe, d’un clan, d’une bande, que ce soit sa famille, son pays, son ethnie… Et si le Christ prend sur lui de choquer son petit cercle de proches c’est pour un bien plus grand, universel : l’annonce du Royaume, le salut du monde. Et dans la réalisation de ce projet salvifique Jésus trace sa route : « Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. » (v. 30).
J’aimerais, je rêverais que l’Esprit Saint fasse de nous des hommes et des femmes libres comme le R.P. Lacordaire, comme saint Dominique, comme le Christ. Pour quoi faire ? Certainement pas pour contenter notre égoïsme libertin. Non ! Que nous soyons libres pour prêcher l’Évangile, libres pour, avec la grâce de Dieu « sous son regard et dans la Charité » ( Éph. 1,4), préparer le Royaume qui vient ! Que nous puissions, malgré la faiblesse de nos moyens, malgré notre jeune âge, là où nous vivons (dans notre famille, dans notre communauté, au collège, au travail, etc.), « porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la délivrance, aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés [et] proclamer une année de grâce du Seigneur. » (Is. 61, 1-2 / Lc. 4. 18-19).
Chères soeurs, chers amis, en recevant à l’autel ce matin le Corps et le Sang du Christ, demandons à son Père, riche en miséricorde, de nous rendre libres, de nous instruire de sa Parole de vérité, de nous guider à la rencontre de nos frères et de nos soeurs. AMEN