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3ème Dimanche de l'Avent B

P Michel Mounier

Jn 1, 6-8.19-28

Que dis-tu de toi-même ? Question redoutable. C’est la question que posent à Jean le Baptiste les religieux intrigués par cet étrange nouveau-venu. Est-il de bonne ou de mauvaise augure ?

Que dirais-je si on me posait la question ? Je resterais sans doute sans voix et je serais entraîné dans des remous intérieurs inextricables. Sans doute que je m’en tirerais en alignant des dates, des événements, des succès, des échecs, une situation de santé, que sais-je encore. Mais qu’est-ce que cela dit vraiment de moi ?

Ferai-je comme le Baptiste en me référant à quelqu’un. Des amis bien-sûr, des relations ! Le Christ peut-être ? Jean répond par rapport à son cousin dont il a fait, dans le sein de sa mère, l’expérience mystérieuse qu’il était le Messie.

Surtout Jean répond par la négative : Je ne suis pas le Messie. Puis en faisant référence au prophète Isaïe. Jean répond toujours par rapport à Jésus : Je suis là pour préparer son chemin.

Agacés, les religieux biaisent, posent la question autrement. Rien à faire ! Jamais l’hirsute du désert ne parle de lui, toujours d’un autre, de l’Autre. Tout ce que je peux dire, c’est que je suis pas digne de délier la courroie de sa sandale.

Devant cet évitement agaçant de Jean, je réalise qu’il s’agit plutôt d’une nécessité. Nécessité brûlante de parler de l’autre. Plus encore, la seule chose que Jean peut dire de lui-même c’est ce qui, dans sa personne, est lié à Jésus. Et les quatre évangiles ne nous en disent rien, de ce lien, rien d’autre que ce tressaillement initial, précoce, qui marquera l’enfant avant qu’il ne soit formé complètement. Je ne sais pas ce que diraient les psychanalystes. Ce que nous disent les Évangiles c’est que pour lui la suite est évidente. Il n’est que ce qu’il est en rapport avec l’autre. Et cela même dans les moments de doute, d’incompréhension, es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ? Oui car celui qui vient est étonnant, pas exactement conforme à ce que le Baptiste attendait ; à celui que le peuple attendait depuis des siècles.

En relisant sous cet angle d’une identité imbriquée, indissociable du Christ, ce début du ministère de Jean, je réalise que tout l’Évangile y est déjà dit.

Alors à la question, que dis-tu de toi-même, je pourrai répondre que je suis rarement paisible, souvent écartelé entre ce que je souhaite et ce que je peux faire, passionné du monde et des autres. Et surtout mon espérance est que je sois aussi, en tout cela, au cœur de tout cela, en rapport avec Lui. Lui qui vient et que je n’ai jamais fini d’attendre.

Et toi, que dis-tu de toi-même ?

Seigneur, toi qui es né dans le fatras d’une étable abandonnée,

tu trouves ton confort dans les maisons ouvertes au vent.

Je t’ouvre la mienne.

Je ne te promets pas d’y trouver une maison digne d’un roi

mais ce serait une joie que dans tout ce fatras

tu te sentes chez toi.