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Solennité de la Pentecôte 2016 - C

Frère Jean-Charles Rigot op

15 mai 2016

Jean 14,15-16.23-26

C’était une paroisse où il ne se passait plus grand chose. Et l’évêque du lieu a décidé d’y envoyer un nouveau prêtre. Deux ans plus tard, l’évêque vient en visite pastorale et découvre une paroisse vivante, renouvelée. L’église est propre, il y a du monde à la messe, le catéchisme motive parents et enfants, les paroissiens sont heureux, accueillants, … . Et l’évêque, impressionné de tout ce qu’il voit partage son émotion au jeune curé : « Ah mon Père, vraiment, quelles merveilles est donc capable de faire l’Esprit Saint ». Ce à quoi le curé répond : « Oui, vous avez bien raison, monseigneur. Mais souvenez-vous quand même de l’état de la paroisse quand l’Esprit Saint était tout seul ! »
Alors oui, je suis désolé, en ces temps de partiels et autres examens, c’est sans doute une mauvaise nouvelle pour les étudiants qui comptaient sur la Pentecôte comme antisèche divine. L’Esprit Saint n’est pas un remède à notre paresse, il ne fera rien sans nous.
Avant tout, l’Esprit est celui qui vient mettre de la chair, du concret dans notre vie. C’est Lui qui nous fait entrer dans le réel. Depuis les commencements du monde où il planait à la surface des eaux pour modeler la création selon la Parole de Dieu, jusqu’à la conception virginale de Jésus dans le sein de Marie, il a été de tous les instants, de tous les commencements, de toutes les créations. A vrai dire, chaque fois que Dieu nous fait une promesse, l’Esprit en fait un don. Une descendance promise ? C’est Dieu lui-même qui se fera l’un des nôtres pour faire de nous ses enfants bien aimés. Un territoire annoncé ? Le monde, habité par l’Esprit, deviendra Terre Sainte. Une promesse de libération ? Mieux encore, c’est un amour sans limite qui nous est offert. Même la loi quittera les tables de pierre pour s’inscrire dans notre chair.
Mais pour cela, l’Esprit a besoin de nous, aujourd’hui, comme nous sommes. Votre CV n’est pas parfait ? Il embauche ! Vous ne vous trouvez pas digne ? C’est encore mieux. Il sait non seulement créer mais également réparer ce qui est faussé, récupérer ce qui était mal parti. Souvenez-vous de Babel : les hommes, trop contents d’eux-même et de leur puissance, ont voulu se mettre à la hauteur de Dieu. Les langues se sont faussées, ils ne pouvaient plus parler entre eux et se sont séparés, dispersés. A la Pentecôte, c’est le contraire qui arrive. Ils étaient enfermés, inquiets, non en haut de la tour mais dans la chambre haute et c’est là que Jésus les rejoint en leur envoyant l’Esprit Saint. Ils se sont mis à parler en différentes langues, non plus pour se justifier eux-même, ni pour se mettre en valeur mais désormais pour parler à chacun et faire découvrir les merveilles de Dieu dans notre monde. Avec l’Esprit, il n’y a plus ni langue morte ou de bois, seule demeure les langues de feu. Ce sont elles qui nous invitent à la charité et nous font aimer nos frères au point de vouloir leur partager ce que nous avons de meilleur, Dieu lui-même qui s’est donné à nous.
Je tiens cependant à vous prévenir, ce n’est jamais anodin de laisser l’Esprit s’installer dans nos vies, c’est même assez peu confortable. C’est précisément quand nous avions bien tout rangé dans notre vie, bien fermé les dossiers que nous ne voulions plus voir ouvert que l’Esprit déboule comme un coup de vent violent qui soulève ce qui était mort, qui mélange ce qui était soigneusement séparé et par la même occasion nous découvre un horizon nouveau. Il n’y a jamais de voie sans issue, ni de voie de garage,mais la voix d’un Dieu qui nous appelle à nous mettre en route. Il peut y avoir des souffrances, voire même la mort, mais sans jamais garder bien longtemps le confort d’un tombeau scellé.
L’Esprit bouscule tout ce qui était soigneusement prévu sans Dieu, il s’invite dans nos fêtes et nos peines pour nous remettre en route vers lui. Ensemble, réjouissons-nous de vivre et de marcher avec lui dans le plus grand des ordres, celui de la miséricorde et de l’amour.