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Saint Dominique et ses soeurs ... en 2 mots !

2 novembre 2009

DIEU LUI AVAIT DONNE
UNE GRÂCE SPÉCIALE
ENVERS LES PÉCHEURS,
LES PAUVRES, LES AFFLIGES
IL EN PORTAIT LES MALHEURS DANS LE SANCTUAIRE INTIME
DE SA COMPASSION.
UNE DE SES DEMANDES
FRÉQUENTES ET SINGULIÈRES
A DIEU
ÉTAIT QU’IL LUI DONNÂT
UNE CHARITÉ
VÉRITABLE ET EFFICACE
POUR LE SALUT
DE TOUS LES HOMMES“.
Jourdain de Saxe Libellus 12,13.

Saint Dominique, fondateur de l’Ordre des Prêcheurs, n’a pas laissé de Règle ni de texte de référence mais une inspiration fondatrice qui est à l’origine des structures et du style de vie des frères et des soeurs. Elle est toujours capable après plus de 750 ans de susciter un fervent désir de se joindre à l’aventure qu’il a commencée.
Ce qui caractérise sa puissante expérience spirituelle et sa sainteté c’est un désir passionné de “se donner tout entier au salut de tous les hommes comme le Christ l’a fait lui-même, car alors seulement il sera membre du Christ”. C’est donc le Christ qui est au centre de sa vocation et de celle qu’il lègue à son Ordre. Ce désir, Dominique l’a mûri dans une intense vie de prière où “il apprenait du coeur de Dieu” l’urgence d’oeuvrer pour le salut car “Seigneur”, priait-il “ma Miséricorde, que vont devenir les pécheurs ?”.
Du mystère de cette charité est né un Ordre dont le génie de Dominique, son don d’organisation, son écoute des signes des temps et son sens de l’Église ont su faire un organisme souple et vivant.
Dominique, dans son intimité avec le Seigneur ami des hommes, et sans doute aussi grâce à ses dons naturels, a appris à aimer les hommes fraternellement et à s’en faire aimer, à les estimer, à leur faire confiance et à respecter leur liberté. Climat résolument optimiste, tout rayonnant de la certitude pascale laissée en héritage à ses fils et à ses filles. Le Christ est ressuscité et en Lui, lavée par sa Pâque, la création a été purifiée de son venin et la joie offerte à ceux qui cherchent le Royaume et sa justice.
Le P. Chenu disait qu’il y a deux portes pour entrer dans l’Ordre : celle de l’appel à la vie contemplative et celle de l’appel apostolique. C’est vrai même pour les moniales. Il en est qui choisissent le monastère pour y trouver la prière continuelle, la pureté du coeur, l’attention totale au mystère de Dieu et qui découvrent ensuite par la familiarité avec saint Dominique la miséricorde et l’intense intercession pour les hommes que Dieu aime. D’autres veulent servir leurs frères, leur ouvrir les chemins de la foi – elles se verraient bien dominicains ! – puis découvrent qu’un des meilleurs moyens de s’approcher de cet idéal est de s’offrir tout entières dans la prière, le silence, père des Prêcheurs, la joyeuse pénitence, sans chercher aucune oeuvre particulière sinon de “croire en Celui que le Père a envoyé “. L’harmonie entre ces deux aspects de la vie dominicaine – harmonie et non conflit ou simple juxtaposition – est le signe d’une vocation épanouie et mûrie.
En plein coeur de l’Eglise, Dominique a voulu faire resplendir la vérité de l’Evangile. C’est inviter à une intense curiosité envers l’insondable mystère de Dieu et surtout à la foi en son amour inlassable pour nous dont tout l’Evangile crie qu’il est plus fort que le péché et que la mort.
Très sensibles à la mission de leurs frères prêcheurs et profondément solidaires avec eux, les moniales veulent accompagner de leur prière “la Parole qui ne retourne pas à Dieu sans avoir accompli son oeuvre”.
La présence de communautés de prière est en effet très importante là – et c’est partout – où l’Evangile est annoncé difficilement, où peut-être il faut des martyrs, mais également là où l’on se heurte à un mur d’indifférence ou de saturation, où les mots ne passent plus. Et qui dira l’impact d’une communauté joyeuse parce qu’elle croit à l’amour de Dieu, simple et fraternelle, vivant chaque jour du pardon du Seigneur, du pain partagé, de sa victoire sur la mort, et attendant vraiment pour tous les hommes la venue définitive du Royaume.
Comme au temps de la “Sainte Prédication de Prouilhe”, les monastères sont lieu de ressourcement et de réconfort pour les frères, un lieu aussi où la Parole peut atteindre les hôtes et les amis venus chercher une lumière pour leur vie, dans le silence et avec le secours de la prière liturgique.
Ces monastères peuvent devenir, Dieu aidant, des lieux où sa Parole résonne avec plus de force car elle est écoutée et accueillie, mais aussi où la souffrance des hommes, leurs larmes, leurs désespoirs sont accueillis dans le “sanctuaire intime de la compassion’ c’est-à-dire dans le coeur et la prière de chaque soeur. Car le sanctuaire n’est pas seulement le lieu où demeure la Gloire de Dieu, il est aussi “la maison de prière pour tous les peuples”, où tous les pauvres peuvent crier et être entendus. Le style de vie que Dominique continue d’inspirer à ses fils et à ses filles, cet album essaiera d’en donner une idée et une image. Ste Catherine de Sienne disait : “La religion de St Dominique est toute large, toute joyeuse, toute parfumée, un jardin de délices”…
ORIGINES
Adressée de Carcassonne le 17 avril 1207 “à la prieure et aux moniales récemment converties par les exhortations et les exemples du fr. Dominique d’Osma et de ses compagnons”, une lettre de l’archevêque de Narbonne est le premier document signalant l’existence d’une communauté féminine autour de l’église Ste Marie de Prouilhe, au pied du village fortifié de Fanjeaux (actuel département de l’Aude).
Voici moins d’un an que ce frère Dominique, ancien sous-prieur du chapitre canonial d’Osma, en vieille Castille, s’est en quelque sorte fixé dans la région, riche déjà, aux côtés de son évêque, d’une précieuse expérience. De longs voyages les ont menés par deux fois jusqu’au Danemark et leur ont permis de s’entretenir à Rome avec le pape Innocent III. Dominique a été lui aussi profondément saisi par l’inefficacité de la prédication des dignitaires cisterciens mandatés poui enrayer les progrès de l’hérésie cathare dans le midi de la France. En juin 1206, à Montpellier, l’évêque et le sous-prieur d’Osma ont alors pris l’initiative de prêcher en mendiant leur nourriture, “à la manière des apôtres”, ôtant ainsi aux meneurs hérétiques l’exclusivité d’un genre de vie pouvant se réclamer immédiatement de l’Evangile.
Premier fruit de cette entreprise bientôt cautionnée par l’autorité du pape Innocent III, le groupement des neuf
femmes rassemblées par Dominique n’a pas tardé à en devenir, sous le nom de “Sainte Prédication de Prouilhe”, le point d’appui matériel et spirituel, même après le déferlement en Languedoc de la Croisade des barons du Nord.
1215 : Après de difficiles années de persévérance dans la prière, la pauvreté, la prédication, Dominique entreprend de réaliser enfin l’idée dont il rêve depuis longtemps dans son coeur : créer un ordre qui s’appellerait et serait “Ordre des prêcheurs”. L e m o n a s t è r e d e Prouilhe trouve sa place dans l’institution nouvelle dont l’approbation pontificale se négocie à Rome, aux lendemains du IVème Concile du Latran.
DE STE SABINE
A Rome, frère Dominique a reçu mission de regrouper et réformer quelques moniales plus ou moins dispersées aux environs immédiats de la ville. Sur sa demande, le pape Honorius III appelle huit soeurs de Prouilhe pour la mise en vigueur d’une même observance dans le monastère que le Maître des Prêcheurs établit près de l’Eglise St Sixte.
Si, à Madrid, des soeurs occupent les lieux que leur ont cédés les frères, Dominique n’a pas manqué de leur notifier par écrit les conditions précises du gouvernement de leur communauté.
A Bologne, où Dominique meurt le 6 août 1221, la construction d’un monastère de soeurs est déjà programmée, Diane d’Andalo ayant fait profession de vie religieuse dans les mains du bienheureux Père.
La présence des moniales dans l’Ordre des Prêcheurs est comme naturellement inscrite dans le projet du fondateur.
EXPANSION
On doit au frère Bernard Gui (t 1337) incontestable patron de tous les archivistes de l’Ordre, les premiers éléments statistiques fiables sur l’expansion de l’Ordre des Prêcheurs en moins d’un siècle, de l’Espagne à la Suède, de la France à l’Ukraine : 394 couvents de frères et 58 de soeurs en 1277 – 554 de frères et 154 de moniales en 1303.
Sur la base de Constitutions mises au point en 1259 par le Sème Maître de l’Ordre, Humbert de Romans (t 1277), le statut canonique des monastères sous la juridiction des prieurs provinciaux se trouvait en effet stabilisé depuis 1267 par le pape Clément IV.
En 1303, sur les dix-huit provinces de l’Ordre, trois seulement ne comptent encore aucun monastère ; la plupart des autres n’en ont que deux ou trois. L’expansion est plus accentuée en France, en Italie, en Allemagne.
Prouilhe demeurant pour tout l’Ordre le foyer d’origine, c’est à Montargis (1245) que se réalise la première fondation sur le sol de France, à l’initiative de la fille de Simon de Montfort, le chef de la croisade contre les Albigeois ; le roi St Louis voudra lui aussi l’implantation d’un monastère, à Rouen, en 1263. Ce seront
ensuite Metz, Viviers, Lille, Aix, Val Duchesse près de Bruxelles, Val des Anges à Bruges etc… Philippe le Bel honorera la dévotion de son grand-père pour le lieu de son baptême en établissant des moniales à Poissy. De tant d’édifices, un seul existe encore aujourd’hui où ni guerres, ni révolutions n’ont interrompu la vie régulière depuis 1316, date du transfert à Estavayer-le-lac d’une communauté d’abord installée à Lausanne en 1280.
Autrement plus nombreuses furent au XIIIème siècle les implantations dans la péninsule italienne : 41 monastères en 1303, dont 26 en Lombardie où la seule ville de Milan n’en compte pas moins de 9 ! Plus remarquable encore la densité de la population dominicaine féminine des pays rhénans : 40 cloîtres de soeurs en 1277, 64 – dont 7 à Strasbourg – en 1303 ! Mettant en oeuvre un dessein déjà amorçé en 1232, deux jeunes veuves de Colmar n’avaient-elles pas fait le voyage de Rome, séjourné au monastère de St Sixte, pour obtenir que l’établissement dont elles rêvaient fût intégré à l’Ordre des Prêcheurs ; leur réussite, ce fut Unterlinden.
Si on enjambe près de trois siècles pour considérer la géographie des monastères dominicains aux lende-
mains du Concile de Trente, le regain de vitalité de certains monastères et la multiplication de nouvelles fondations ne se rattachent pas directement aux modifications du droit canonique mais procèdent plutôt de ces courants de renouveau qui ont donné de la vie aux décisions conciliaires plus qu’ils n’en ont reçu.
L’élan espagnol du siècle d’or fait surgir une cinquantaine de monastères nouveaux, tandis que 18 fondations se réalisent en Amérique latine, du XVIème au XVIII siècle.
Si le bouleversement de la carte religieuse allemande après la Réforme entraîne la disparition de 21 monastères, ceux qui subsistent se signalent parfois par une haute qualité de vie mystique.
En Angleterre, les pertubations provoquées par le schisme d’Henri VIII (1534) conduisent à l’exil puis à l’extinction des monastères ; néanmoins, dès le XIXème siècle, il y aura de nouveau 3 monastères anglais.
En Irlande, la persécution n’empêchera pas de nouvelles fondations dont celle de Drogheda au XVIIIème siècle.
En France, l’invasion mystique qui entraîne des réformes comme celle de Port-Royal et provoque tant de fondations – du Carmel à la Visitation – explique pareillement l’apparition de nombreux foyers nouveaux de vie contemplative dominicaine. Douze monastères dérivent directement ou indirectement de la réforme opérée en 1592 à Ste Praxède d’Avignon (fondé en 1347).Sept autres se rattachent de la même manière à Ste Catherine de Toulouse, établi en 1611. Dans l’un et l’autre cas se rencontre l’influence décisive du P. Sébastien Michaelis (t1618) promoteur d’un mouvement de renouveau dominicain en France. Deux des cnmmimautés ainsi fondées ont réussi leur traversée de la Révolution française et vivent encore aujourd’hui soit à Langeac (fondé en 1623) soit à Evry (monastère de la Croix-Paris 1636).
Ayant repris la vie commune dès 1805 dans les bâtiments de leur ancien monastère, les soeurs de Nay (Hautes Pyrénées) se sont trouvées ensuite, de différentes manières, à l’origine de 13 des 18 monastères actuellement implantés en territoire français. A partir de la France ou de la Belgique se sont réalisées des fondations aux Etats-Unis, au Canada, au Japon, au Brésil, en Norvège, au Cameroun, au Burundi.