
2ème Dimanche de l'Avent A
Fr Philippe Jaillot op
Mt 3. 1-12
Frères et sœurs,
En ce deuxième dimanche de l’Avent, deux voix résonnent : celle d’Isaïe et celle de Jean-Baptiste.
Et ce qui frappe, c’est que l’une parle au futur, l’autre au présent. La liturgie nous les met en dialogue.
Isaïe ouvre devant nous un horizon : un descendant de Jessé viendra. Sous son règne, la justice fleurira, la paix grandira, la création elle-même sera réconciliée. Tout annonce un monde à venir, un avenir que Dieu prépare patiemment. Cette promesse nourrit notre espérance.
Mais l’Évangile, lui, nous ramène immédiatement à l’urgence du présent.
Jean-Baptiste ne dit pas : « Vous vous convertirez » mais : « Convertissez-vous ».
La venue du Seigneur ne se prépare pas demain ; elle commence maintenant, dans la réalité de nos vies.
Jean parle dans le désert. Or chacun de nous porte en lui un désert : ces zones de pauvreté, de fatigue, de désordre, où nous n’avons plus de faux appuis. Et c’est justement là que Dieu vient nous rejoindre, parce que rien n’y fait écran à sa Parole.
Dans ce désert intérieur, Dieu nous pose sa question ancienne et neuve à la fois :
« Où es-tu ? » Il l’a posée à Adam, mais la pose encore aujourd’hui.
Il ne demande pas : « Où étais-tu hier ? », mais : « Où es-tu aujourd’hui ? »
Jean-Baptiste va droit au but : il démasque les refuges illusoires.
Se dire : « Nous avons Abraham pour père », c’est vivre sur un passé, sur une identité déjà acquise. Mais la conversion n’est jamais un héritage, elle est une décision au présent.
Nos fidélités d’hier, nos belles histoires, nos engagements passés ne suffisent pas à répondre à la voix de Dieu aujourd’hui.
Dieu attend un cœur qui s’ouvre maintenant, un pas qui se fait maintenant, une vie qui se tourne vers lui maintenant.
Jean utilise des images fortes : la hache à la racine, la pelle à vanner. Ces images ne sont pas là pour nous apeurer, mais pour nous rappeler que la venue du Christ n’est pas un événement décoratif ou transparent.
Quand le Seigneur vient, il y a un projet et il y a un impact. il vient purifier, dégager, libérer.
Le Christ Seigneur ne détruit pas l’arbre : il en coupe les branches mortes pour qu’il porte du fruit.
Il ne brûle pas la personne : il consume la paille qui l’encombre.
Et ce travail, aucun de nous ne peut le faire seul. Mais celui qui vient derrière Jean, c’est-à-dire le Christ, le plus Fort, le Très-Haut devenu proche, vient avec un don que personne d’autre ne peut offrir : le baptême dans l’Esprit Saint et dans le feu. Il vient avec ce qui sera notre remède : en notre vie agira sa naissance, sa présence parmi nous, sa passion, sa mort et sa résurrection.
Saint Rémi prêchait que le Christ est venu après Jean le Baptiste de cinq manières : par sa naissance, par sa prédication, par son baptême, par sa mort, par sa descente aux enfers.
C’est cela que Jean le baptiste traduit par notre baptême dans l’Esprit Saint et dans le feu. L’image indique que le feu éclaire, purifie et ranime ce qui était éteint.
Et l’Esprit donne une vie nouvelle ; il rend possible ce qui nous semblait impossible.
Alors, convertissez-vous, crie Jean le Baptiste ! Et accueillez pour de vrai Celui qui vient. Laissez-le s’approcher de votre vie. Entrez dans la nouveauté qu’il offre à votre avenir. « Celui qui ne se repent pas de sa vie passée, disait saint Augustin, celui qui ne se repent pas de sa vie passée ne peut pas en commencer une nouvelle. »
Frères et sœurs, l’Avent n’est pas seulement un temps d’attente : c’est un temps de renouvellement.
Laissons les mots de Jean le Baptiste réveiller en nous le désir de Dieu.
Acceptons que « Celui qui vient », le Christ, vienne nous retrouver dans nos déserts.
Ouvrons, aujourd’hui, ce qui doit s’ouvrir en nous, et laissons le Seigneur approcher ce qui doit être transformé.
Car il vient.
Amen.
